Chez nous, c'est l'été...
Les volets s'ouvrent en grand sur les jardins
que l'astre, dès les premières heures, réchauffe et illumine.
Les abeilles, câlines, butinent
le creux des fleurs de satin.
Les oiseaux, chantent, sifflent, roucoulent.
Sur les cordes à linge, suspendus dès le réveil,
les grands draps s'offrent à la caresse du soleil
et, au souffle à peine perceptible de la brise, ondulent...
Et la matinée s'écoule ainsi, sereine et lumineuse...
Mais quand vers midi, sentant la chaleur accablante, tu lèves les yeux vers le ciel, ils sont là...
En troupeaux noirs et serrés, ramassés au-dessus des montagnes, les nuages lourds descendent lentement sur les grands eucalyptus et les acacias odorants qu'ils couronnent d'une brume opaque.
Il fait sombre tout-à-coup, le soleil poussé vers le littoral forme une large bande brillante du côté de la mer...
Ici, les oiseaux ont fini de chanter. Les grands draps pendent, inertes, attendant qu'on les rentre à l'abri... Ils ont gardé un peu de chaleur et un parfum vague d'acacia...
Au loin, le tonnerre gronde, menaçant. Un éclair froid balaye le ciel de plomb, la bande brillante s'amenuise, les volets s'entrebâillent, se fermeraient presque si ce n'était cette chaleur moite, étouffante...
Dans la pièce noyée de pénombre, près d'un fauteuil créole, une petite lampe verse sa douce lumière sur les pages d'un livre. Un éventail en bois de santal s'agite, laissant s'envoler des papillons de soie. C'est l'heure de la sieste mais il fait lourd, le temps se pose... Il fait si chaud !
Soudain la lumière tressaille, une lueur bleue traverse la pièce et le tonnerre éclate en faisant trembler la maison de bois. Le ciel se déchire enfin, libérant une averse drue et droite que la terre accueille exhalant des vapeurs aux effluves de feuilles sèches...
Un souffle frais ravit l'après-midi. Les papillons de soie se posent
sur les paupières closes.
C'est l'heure de la sieste...