Le Gouffre
Je connais un lieu désolé
Où l’océan, sans fin,
Heurte la falaise déchiquetée
Où l’alizé puissant
Chante un Requiem lugubre
Aux vagues qu’il chevauche.
Là, aux pieds des filaos courbés,
La roche noire s’est déchirée
Laissant s’engouffrer
Dans une blessure béante
La houle furieuse et blanche
Agitant sa faux sous un manteau d’écume.
Ah ! Te conterais-je
Le sort malheureux
Du promeneur imprudent ?
Et combien de cœurs en perdition
Se sont abandonnés aux flots impétueux,
Croyant trouver là, la fin des tourments ?...
Mais on raconte que certains soirs
La mer sanglote entre les parois noires
Les arbres se lamentent
Comme des enfants perdus…
Si alors, téméraire,
Tu oublies le temps
A la rouille des grilles de fer,
Tu verras, à l’heure où les ombres
S’allongent et se confondent…
Tu verras de bien étranges promeneurs
Dont le pas ne fait plus bruire l’herbe jaunie
Et ne laisse pas de dessin sur le sable fin…
"Le Gouffre" à l'Etang-Salé